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Adjectifsans nuance entre le bien et le mal. Voici le solution du groupe 68 grille 1 Adjectif sans nuance entre le bien et le mal. MANICHEEN. Nom celte de la Bretagne. Voici le solution du groupe 68 grille 1 Nom celte de la Bretagne. ARMORIQUE. Se dit dâun sketch jouĂ© sans rĂ©pĂ©tition
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CodyCrossSolution pour SE DIT D'UN SKETCH JOUĂ SANS RĂPĂTITION de mots flĂ©chĂ©s et mots croisĂ©s. DĂ©couvrez les bonnes rĂ©ponses, synonymes et autres types d'aide pour rĂ©soudre
Lechef d'orchestre et président du Bard College Leon Botstein lors d'une répétition de l'un des rares opéras du compositeur Antonin Dvorak, à New York le 17 juillet 2017
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Codycross est un jeu dans lequel vous devez deviner plusieurs mots Ă partir de dĂ©finitions qui vous sont donnĂ©es. Dans cet article, dĂ©couvrez la solution de la grille n°2 du groupe 551 dans le monde "Stations Touristiques". Dans cette grille, 17 mots sont Ă deviner. DĂ©finition RĂ©ponse Exclu de la succession d'un parentdesheriteMagicien franco-espagnol complice de Denise FabregarcimoreSe dit d'un sketch jouĂ© sans rĂ©pĂ©titionimproviseCousin du cerf dont le petit s'appelle le faonchevreuilJumelle Ă un verre que l'on peut Ă©tirerlonguevueLa mĂšre de NĂ©ronagrippineBataille armĂ©e utilisant des billes de peinturepaintballLors d'un examen, note illĂ©gale avec les rĂ©ponsesantisecheBoulevard piĂ©tinĂ© au Festival de CannescroisetteCĂ©lĂšbre piment rouge basqueespeletteQui fait preuve d'ingĂ©niositĂ©astucieuxScience de l'amĂ©nagement des villesurbanismeCrĂ©ature créée par Annette Tison et Talus TaylorbarbapapaOn trouve la gamme Quechua dans ce magasindecathlonElle va Ă l'universitĂ©etudianteMettre fin au sommeil de quelqu'unreveillerIncendie violent, lieu extrĂȘmement chaudfournaise FĂ©licitations, vous venez de rĂ©ussir la grille n°2 du groupe 551 monde "Stations Touristiques" de Codycross. Vous pouvez continuer Ă jouer en dĂ©couvrant la solution de la grille suivante. Pour cela, cliquez sur le lien suivant Solution de la grille suivante
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Si Dieu nâavait pas souhaitĂ© la rĂ©pĂ©tition, le monde nâaurait jamais Ă©tĂ© créé.â SĂžren Kierkegaard, La rĂ©pĂ©tition RĂ©pĂ©tition ontologique et rĂ©pĂ©tition linguistique 1 Comment accorder tout un chacun » au fĂ©minin ? Dire tout un chacun et toute une chacune » ? Le ... 1Ă lâinstar du temps » ou de la personne » qui sont pour tout un chacun1 des donnĂ©es universelles de lâexpĂ©rience humaine avant dâĂȘtre des catĂ©gories linguistiques, le mot rĂ©pĂ©tition » renvoie Ă des phĂ©nomĂšnes extrĂȘmement hĂ©tĂ©rogĂšnes, qui vont bien au-delĂ du domaine du langage. On imagine mal un anthropologue se pencher sur les marqueurs de la reformulation, un philosophe consacrer un ouvrage Ă lâadjectif, un gĂ©nĂ©ticien explorer les mots du discours, ou encore un psychanalyste interroger lâinconscient tapi dans les anaphores, alors que tous et toutes sâintĂ©ressent Ă la rĂ©pĂ©tition. 2De fait, nous vivons dans la rĂ©pĂ©tition, quâelle soit cosmologique dans le mouvement des vagues, lâalternance des jours et le changement des saisons, biologique dans les battements du cĆur et la respiration, anthropologique dans lâorganisation sociale et culturelle. Le linguiste qui sâintĂ©resse Ă elle sâinscrit donc dans un champ de recherches dĂ©mesurĂ©ment ouvert, oĂč la multitude des disciplines concernĂ©es reflĂšte lâimmensitĂ© des phĂ©nomĂšnes Ă explorer. ConfrontĂ© Ă une pluralitĂ© de pratiques et de thĂ©ories insurmontable, doit-il alors, dans un souci de scientificitĂ©, faire lâimpasse sur ce qui ne relĂšve pas strictement de son propre champ disciplinaire ? Ou considĂ©rer quâil est possible, et mĂȘme nĂ©cessaire, dâĂ©tablir des ponts entre ces diverses disciplines, et quâil serait temps de faire le lien entre la rĂ©pĂ©tition ontologique et la rĂ©pĂ©tition linguistique ? Câest ce deuxiĂšme choix, celui dâune interdisciplinaritĂ© intĂ©grative, qui a Ă©tĂ© fait. 2 Pour reprendre le titre dâun article de lâanthropologue Marcel Mauss, consacrĂ© Ă la notion de pers ... 3En vertu du principe En quelque situation quâil apparaisse, un signe signifie tout ce quâil peut signifier selon le code lexical, mĂȘme si le contexte et la situation de communication ne lâexigent pas » Rey et Rey-Debove 1985, p. 25, la rĂ©pĂ©tition verbale ne peut ĂȘtre dissociĂ©e de la rĂ©pĂ©tition non verbale, câest une catĂ©gorie de lâesprit humain »2. Mon parcours, qui mâa menĂ©e de la rĂ©pĂ©tition en discours Ă la magie de la rĂ©pĂ©tition, mâa ainsi fait articuler les traditions proches et distinctes de la stylistique, de la rhĂ©torique et de lâargumentation, de la linguistique textuelle allemande et de lâanalyse de discours Ă la française, mais il mâa conduite aussi, moins classiquement, Ă faire des incursions vers la psychanalyse et la psychologie de la Gestalt, pour finalement parvenir Ă lâanthropologie et mâinspirer des Ă©tudes sur les formules sacramentelles et la magie, gĂ©nĂ©ralement considĂ©rĂ©es comme Ă©trangĂšres Ă la linguistique. 4Avant donc dâaborder la rĂ©pĂ©tition en discours, ce prologue propose dâen rappeler la dimension transversale et ontologique, et dâen parcourir lâapprĂ©hension et la rĂ©ception en dehors des sciences du langage en psychanalyse et en philosophie, mais aussi dans lâĂ©ducation et lâapprentissage, et puis dans la musique, dans les arts visuels et les arts vivants. Il se veut de portĂ©e trĂšs gĂ©nĂ©rale, et jâen appelle Ă lâindulgence et la patience des spĂ©cialistes des disciplines parcourues, face Ă ces quelques pages de cadrage descriptives mais mĂ©thodologiquement nĂ©cessaires. Une dynamique transversale 3 On gardera en mĂ©moire que le mot principe », avant de signifier prĂ©cepte » ou rĂšgle », renvo ... 5 Au commencement Ă©tait la rĂ©pĂ©tition » Genette 1999, p. 101. Lâarticle de lâEncyclopĂŠdia Universalis consacrĂ© Ă la rĂ©pĂ©tition dans le langage la caractĂ©rise dĂšs la premiĂšre ligne comme un principe crĂ©ateur universel » La rĂ©pĂ©tition est un principe crĂ©ateur universel rĂ©gissant toute communication depuis lâunitĂ© minimale du signifiant signes, lettres, sons jusquâaux ensembles les plus larges un rĂ©cit entier par exemple » Klauber, s. d.. De fait, il nâest pas de langage sans rĂ©pĂ©tition. Câest par la rĂ©pĂ©tition dâun nombre fini de phonĂšmes, de morphĂšmes, de lexĂšmes que naĂźt le discours, virtuellement infini. Quâen estâil en dehors du langage ? Force est de constater que la rĂ©pĂ©tition est le principe »3 de toute organisation en systĂšme. Câest par elle que sont surmontĂ©es les frontiĂšres de la finitude. Câest elle qui nous fait passer du fini Ă lâinfini. 6La premiĂšre phrase de la quatriĂšme de couverture dâun ouvrage rĂ©cent sur la rĂ©pĂ©tition proclame la rĂ©pĂ©tition est une catĂ©gorie ouverte aux dimensions multiples du temps et de lâaltĂ©ration » Delaplace 2014. Il faudrait prĂ©ciser. La rĂ©pĂ©tition nâest pas une catĂ©gorie parmi dâautres. DĂšs lors que lâon admet son statut ontologique, il faut en reconnaĂźtre toute la portĂ©e. Et reformuler la rĂ©pĂ©tition est la catĂ©gorie sans laquelle le temps ne peut ĂȘtre pensĂ©. 7Il nâest pas de temps sans rĂ©pĂ©tition. Câest la rotation de la Terre sur elle-mĂȘme et autour du Soleil qui rĂšgle lâalternance du jour et de la nuit, puis le rythme des saisons, etc. On peut mĂȘme aller plus loin et se demander est-il possible de penser la vie sans rĂ©pĂ©tition ? LâADN, la molĂ©cule du vivant, ne rĂ©pĂšte-t-elle pas dâinterminables sĂ©quences de seulement quatre nuclĂ©otides ? Quel est le vivant qui ne se rĂ©pĂšte pas ? Tout se rĂ©pĂšte, hormis la naissance et la mort, la premiĂšre et la derniĂšre fois. Câest seulement lorsque survient la mort que cesse la rĂ©pĂ©tition. 4 La fin vers laquelle tend toute vie est la mort ; et inversement, le non-vivant est antĂ©rieur au ... 5 Je gröĂer der Widerstand ist, desto ausgiebiger wird das Erinnern durch das Agieren Wiederholen ... 8Mais on peut cependant tout autant inverser la perspective et dire la rĂ©pĂ©tition, câest la mort. Câest ce quâa thĂ©orisĂ© Freud, au lendemain de la PremiĂšre Guerre mondiale, dans Jenseits des Lustprinzips 1920. Dans ce texte se trouve relatĂ© lâĂ©pisode cĂ©lĂšbre du Fort-Da de lâenfant Ă la bobine, qui analyse le comportement rĂ©pĂ©titif infantile, mais surtout, Freud y dĂ©finit la rĂ©pĂ©tition comme pulsion de mort, comme ce qui nous ramĂšne inĂ©luctablement Ă lâĂ©tat dâavant la vie, Ă la non-vie, au nĂ©ant. Sa formulation reste inĂ©galĂ©e dans sa radicalitĂ© Das Ziel alles Lebens ist der Tod, und zurĂŒckgreifend Das Leblose war frĂŒher da als das Lebende » Freud 19204. Avant toutefois dâarriver Ă ce pessimisme radical, Freud avait dĂ©crit lâavĂšnement de la nouvelle mĂ©thode pour guĂ©rir les nĂ©vroses, la cure psychanalytique, comme un processus oĂč deux types de rĂ©pĂ©titions se livraient un combat sans merci Freud 1914. Ă la rĂ©pĂ©tition inconsciente, non maĂźtrisĂ©e, celle du refoulement qui nous agit wiederholen-agieren5, le sujet de la cure parvient Ă opposer la rĂ©pĂ©tition consciente, la remĂ©moration erinnern, qui permet de perlaborer » durcharbeiten le traumatisme et de sâen libĂ©rer. La fin de la cure marque la victoire de la bonne rĂ©pĂ©tition sur la mauvaise rĂ©pĂ©tition. La mauvaise rĂ©pĂ©tition traduit lâĂ©chec de la fonction mnĂ©sique, la bonne rĂ©pĂ©tition lutte contre lâamnĂ©sie. 9RĂ©pĂ©ter de maniĂšre mĂ©canique, automatique ou se remĂ©morer vaincre les rĂ©sistances, lever le refoulement, accĂ©der Ă la conscience, telle est la question. Au-delĂ des termes spĂ©cifiques de la psychanalyse rĂ©sistance, refoulement, perlaborationâŠ, nous retrouverons la dualitĂ© qui traverse toute notre expĂ©rience du temps. 10Les philosophes, en particulier ceux des XIXe et XXe siĂšcles, ont thĂ©orisĂ© le principe de rĂ©pĂ©tition. Chez Nietzsche, elle est lâexpression de la volontĂ© de puissance et Ă©ternel retour du mĂȘme die ewige Wiederkunft » Alles geht, Alles kommt zurĂŒck; ewig rollt das Rad des Seins. Alles stirbt, Alles blĂŒht wieder auf, ewig lĂ€uft das Jahr des Seins. Alles bricht, Alles wird neu gefĂŒgt; ewig baut sich das gleiche Haus des Seins. Alles scheidet, Alles grĂŒĂt sich wieder; ewig bleibt sich treu der Ring des Seins. In jedem Nu beginnt das Sein; um jedes Hier rollt sich die Kugel Dort. Die Mitte ist ĂŒberall. Krumm ist der Pfad der Ewigkeit. Nietzsche 1884, p. 95 Tout passe et tout revient, Ă©ternellement tourne la roue de lâĂȘtre. Tout meurt, tout refleurit ; Ă©ternellement se dĂ©roule le cycle de lâĂȘtre. Tout se brise, tout se rajuste ; Ă©ternellement sâĂ©difie la mĂȘme demeure de lâĂȘtre. Tout se disjoint, tout se retrouve ; le cycle de lâexistence demeure Ă©ternellement fidĂšle Ă lui-mĂȘme. Lâexistence commence Ă chaque instant ; autour de chats ici autour de chaque ici » gravite la sphĂšre de lĂ -bas ». Le centre est partout. La route de lâĂ©ternitĂ© revient sur elle-mĂȘme. Traduit par GeneviĂšve Bianquis, 1962, p. 429-430 11Mais elle est dualitĂ©, tension entre rĂ©pĂ©tition vivifiante ou mortifĂšre chez Kierkegaard. Selon le philosophe danois, seule la rĂ©pĂ©tition en avant » souvent traduite par reprise » a le pouvoir de rendre lâĂȘtre humain heureux Lâamour de la rĂ©pĂ©tition est en vĂ©ritĂ© le seul heureux. [âŠ] il ne reprĂ©sente pas lâinquiĂ©tude de lâespoir ou lâangoisse de lâaventure ou de la dĂ©couverte, pas plus que la mĂ©lancolie du ressouvenir. Il a la sainte assurance de lâinstant prĂ©sent. Lâespoir est un habit neuf raide et serrĂ©, bien quâon ne lâait jamais portĂ©, on ignore sâil vous va ou sâil vous siĂ©ra. Le ressouvenir est un vieil habit qui ne va plus car vous avez grandi. La rĂ©pĂ©tition est un habit inusable, qui vous tient comme il faut, tout en restant souple, sans vous Ă©touffer. Kierkegaard 1990 [1843], p. 60-61 6 Il faut noter que lâemploi que Kierkegaard fait des termes de ressouvenir et de rĂ©pĂ©tition le ter ... 12Câest le ressouvenir, la rĂ©pĂ©tition en arriĂšre », qui le rend malheureux6 Reprise et ressouvenir sont un mĂȘme mouvement, mais en direction opposĂ©e ; car ce dont on a ressouvenir a Ă©tĂ© câest une reprise en arriĂšre ; alors que la reprise proprement dite est un ressouvenir en avant. Câest pourquoi la reprise, si elle est possible, rend lâhomme heureux, tandis que le ressouvenir le rend malheureux [âŠ]. ibid., p. 65-66 13Pour Deleuze, la rĂ©pĂ©tition constitue le principe mĂȘme de la diffĂ©rence. Il voit en la rĂ©pĂ©tition non pas un affaiblissement de lâorigine et du commencement, mais au contraire sa potentialisation ou sa mise en puissance RĂ©pĂ©ter, câest se comporter, mais par rapport Ă quelque chose dâunique et de singulier, qui nâa pas de semblable ou dâĂ©quivalent. [âŠ] Non pas ajouter une seconde et une troisiĂšme fois Ă la premiĂšre, mais porter la premiĂšre fois Ă la niĂšme » puissance. [âŠ] câest la prise de la Bastille qui fĂȘte et qui rĂ©pĂšte Ă lâavance toutes les FĂ©dĂ©rations ; ou câest le premier nymphĂ©a de Monet qui rĂ©pĂšte tous les autres. Deleuze 2011 [1968], p. 7-8 7 Le verset complet est Ce qui a Ă©tĂ©, câest ce qui sera, et ce qui sâest fait, câest ce qui se f ... 8 Plus prĂ©cisĂ©ment On ne peut pas entrer une seconde fois dans le mĂȘme fleuve, car c'est une aut ... 14De maniĂšre bien plus primitive, nous faisons tous au jour le jour le constat de la dualitĂ© existentielle de la rĂ©pĂ©tition, comme lâatteste la sagesse proverbiale qui, de son cĂŽtĂ©, oppose les deux visages de Janus de la rĂ©pĂ©tition. Au constat fataliste Rien de nouveau sous le soleil » EcclĂ©siaste I, 97, Ă la vanitĂ© de la condition humaine, placĂ©e sous le cycle de la mort, Car tu es poussiĂšre et tu retourneras Ă la poussiĂšre » GenĂšse I, 19, sâoppose le constat dâune impossible rĂ©pĂ©tition On ne se baigne jamais deux fois dans le mĂȘme fleuve » dâaprĂšs HĂ©raclite8. Notre expĂ©rience du retour du mĂȘme, de lâidentique, est trompeuse. Toute rĂ©pĂ©tition est dĂ©jĂ diffĂ©rence, irrĂ©ductiblement singuliĂšre, le mĂȘme est toujours autre, on ne peut pas arrĂȘter le cours du temps. Ătre se dit en rĂ©alitĂ© du devenir, câest le principe de diffĂ©rence qui rĂ©git le monde, et non celui de la rĂ©pĂ©tition. 15Qui sâintĂ©resse Ă la rĂ©pĂ©tition se voit nĂ©cessairement confrontĂ© Ă cette tension, Ă ce que je formulerai ici comme les deux rĂšgles antagonistes de la rĂ©pĂ©tition Tout se rĂ©pĂšte. Tout est toujours la premiĂšre fois. 16Cette dualitĂ© nâest pas uniquement dâordre temporel, elle peut ĂȘtre Ă©galement interprĂ©tĂ©e comme celle qui oppose lâuniversel au singulier. Alberto Giacometti, sculpteur de lâhumain universel, a rĂ©sumĂ© ce paradoxe de la rĂ©pĂ©tition en reformulant lâadage dâHĂ©raclite On descend et on ne descend pas deux fois le mĂȘme fleuve » citĂ© par DufrĂȘne 1992, p. 111. La rĂ©pĂ©tition sâinscrit toujours entre fini et infini, entre mĂȘme et autre, entre mort et vie. Toujours, elle oscille entre ces/ses deux pĂŽles Dans la rĂ©pĂ©tition, il y a tout Ă la fois le jeu mystique de la perte et du salut, tout le jeu théùtral de la mort et de la vie [âŠ] » Deleuze 2011, p. 12. 17On peut appeler cette dualitĂ© de la rĂ©pĂ©tition jeu », tension », paradoxe », antagonisme » ou encore mystĂšre », Ă©nigme », etc. Il nâest pas de domaine oĂč lâon ne puisse la retrouver. La mort ou la vie, lâassumĂ© ou le subi, lâinsoutenable ou le sublime, le BolĂ©ro de Ravel ou le disque rayé⊠à lâorigine de cette Ă©tude de la rĂ©pĂ©tition verbale, il y a donc le constat de cette Ă©nigme insaisissable et le souhait dâapprĂ©hender certaines de ses modalitĂ©s. Ambivalence de la rĂ©pĂ©tition 9 Voir Barthes 2000 [1973], p. 66-69. 18On peut rĂ©sumer ce qui prĂ©cĂšde en posant deux paradigmes contraires de la rĂ©pĂ©tition un paradigme mortifĂšre câest le rien de nouveau sous le soleil », la compulsion de rĂ©pĂ©tition, Wiederholungszwang, la rĂ©pĂ©tition honteuse »9, et toutes les notions nĂ©gatives connexes qui lui sont attachĂ©es lâobsession nĂ©vrotique, le ressassement, les automatismes, les stĂ©rĂ©otypes, le mĂ©canique, lâhabitude, le tourner-en-rond, le cercle vicieuxâŠ, auquel sâoppose un paradigme du vivant câest toujours la premiĂšre fois », la rĂ©pĂ©tition comme re-crĂ©ation, comme ce qui permet de remonter Ă la source, Ă lâĂ©lan, au jaillissement. La rĂ©pĂ©tition dans la langue 19Comment ces deux paradigmes sont-ils inscrits dans la langue ? Ă premiĂšre vue, on observe dans la langue française une certaine dissymĂ©trie. 20Le paradigme mortifĂšre de la rĂ©pĂ©tition, le plus familier, inscrit dans notre expĂ©rience dâhumain ce passĂ© qui ne passe pas, le temps immobile de la douleur, ce qui nous tire tout au fond, paraĂźt sâĂȘtre dĂ©posĂ© dans la langue mĂȘme. Il suffit de consulter les dictionnaires. Ă lâarticle rĂ©pĂ©tition » dans le TrĂ©sor de la langue française informatisĂ©, on ne trouve que des collocations et synonymes dĂ©prĂ©ciatifs, quâil sâagisse des noms rabĂącherie, radotage, rengaine, scie », des adjectifs rĂ©pĂ©tition constante, continuelle, fastidieuse, inutile, machinale, mĂ©canique, monotone, stĂ©rĂ©otypĂ©e ; rĂ©pĂ©titions considĂ©rables, frĂ©quentes, innombrables, superflues ; de vaines rĂ©pĂ©titions », ou des verbes Ă©viter une rĂ©pĂ©tition ; avoir tendance Ă la rĂ©pĂ©tition ; corriger les rĂ©pĂ©titions ». On se dit alors que la nĂ©gativitĂ© de la rĂ©pĂ©tition est vĂ©ritablement inscrite dans la langue française â on observe dâailleurs que lâadjectif rĂ©pĂ©titif » ne peut ĂȘtre que pĂ©joratif. 21Quâen est-il de lâautre paradigme ? Si, spontanĂ©ment, les synonymes affluent qui disent la mauvaise rĂ©pĂ©tition, ils se dĂ©robent dĂšs quâil sâagit de dĂ©signer la rĂ©pĂ©tition positive. Comment la nommer ? Comment la dĂ©signer ? Existe-t-il un terme qui dise une rĂ©pĂ©tition libĂ©ratrice, et non ressassante ? Qui dise non lâenfermement, mais lâĂ©lan ? La mĂ©taphore du cercle nous fournit un exemple frappant de cette apparente dissymĂ©trie, lâexpression cercle vicieux est lexicalisĂ©e ; celles de cercle vertueux et cercle dynamique sonnent encore comme des oxymores ; en allemand, le cercle est dit diabolique et non divin Teufelskreis est un nom composĂ© du dictionnaire ; Gotteskreis, en revanche, est une crĂ©ation lexicale ad hoc. 10 En ligne [ s. v. rĂ©pĂ©tition ». 22Est-ce Ă dire quâil nây aurait pas de termes pour dire la bonne rĂ©pĂ©tition ? Un recours au Dictionnaire Ă©lectronique des synonymes DES10 vient contredire cette conclusion. Pas moins de cinquante-quatre synonymes sont donnĂ©s pour la rĂ©pĂ©tition. Un classement par score des dix premiers, Ă©tabli Ă partir de compilations de dictionnaires de synonymes, est en outre proposĂ© 1 recommencement2 rabĂąchage3 rĂ©itĂ©ration4 rengaine5 renouvellement6 reprise7 retour8 frĂ©quence9 plĂ©onasme10 redite 23Ă la toute premiĂšre place se trouve le terme positif de recommencement. On peut rĂ©partir tous les synonymes selon trois sous-ensembles 1 les termes neutres rĂ©itĂ©ration, reprise, retour, frĂ©quence ; 2 les synonymes connotĂ©s positivement recommencement, renouvellement ; ces deux sous-ensembles attestent une grande variĂ©tĂ© dans leurs contextes dâemploi ; 3 les synonymes connotĂ©s nĂ©gativement rabĂąchage, plĂ©onasme, redite, rengaine, qui ont la particularitĂ© de porter exclusivement sur la rĂ©pĂ©tition dans le langage. 11 En ligne [ 12 Traduction rafraĂźchissement, renouvellement, amoncellement, imitation, litanie, rĂ©gularitĂ©, rĂ© ... 24En allemand, le Wortschatz-Portal11 donne comme synonymes de Wiederholung, par ordre alphabĂ©tique Auffrischung, Erneuerung, HĂ€ufung, Imitation, Litanei, RegelmĂ€Ăigkeit, Rekapitulation, Repetition, Replik, Reprise, RĂŒckfall, Training, Ăbung, Vorbeten, Wiederkehr12. Soit des termes majoritairement neutres, deux termes connotĂ©s positivement Auffrischung, Erneuerung / rafraĂźchissement, renouvellement et deux termes connotĂ©s nĂ©gativement RĂŒckfall, Litanei / rechute, litanie. Aucun synonyme dĂ©prĂ©ciatif pour dire la mauvaise rĂ©pĂ©tition dans la langue. 25La rĂ©pĂ©tition nâest intrinsĂšquement ni bonne ni mauvaise. Mais en France, la reprĂ©sentation qui est donnĂ©e dâelle dans le langage a fait de la mauvaise rĂ©pĂ©tition le paradigme le plus saillant. La rĂ©pĂ©tition dans les manuels scolaires 13 Voir FrĂ©dĂ©ric 1985, chap. 1 et 2 et Prak-Derrington 2016a. 26Cette conception nĂ©gative de la rĂ©pĂ©tition nâa pas toujours Ă©tĂ© dominante voir FrĂ©dĂ©ric 1985 de lâAntiquitĂ© au XVIe siĂšcle, la rĂ©pĂ©tition constituait lâune des figures de mots les plus apprĂ©ciĂ©es des auteurs de traitĂ©s de rhĂ©torique. Elle est ensuite tombĂ©e en disgrĂące, pour ne plus ĂȘtre considĂ©rĂ©e, depuis le xixe siĂšcle, que comme un dĂ©faut de style qui doit ĂȘtre soigneusement Ă©vitĂ©13. Tout se passe comme si, pour lâacception standard, des contraintes gĂ©nĂ©riques particuliĂšres celles de lâĂ©crit et non celles de lâoral, celles du roman en prose face Ă la poĂ©sie, etc. sâĂ©taient transformĂ©es en proscription gĂ©nĂ©ralisĂ©e. Il semble que lâinstitution scolaire a jouĂ© un rĂŽle de tout premier plan dans cette mise au ban de la rĂ©pĂ©tition, du xixe siĂšcle Ă nos jours. Ă ce qui se conçoit bien sâĂ©nonce clairement », il faudrait ajouter pour les Ă©coliers et Ă©tudiants français, singulativement ». Dans tous les manuels scolaires, tandis que sont prĂŽnĂ©es diversitĂ© et variĂ©tĂ© lexicales, parce quâelles attestent de la richesse du vocabulaire, la rĂ©pĂ©tition est fustigĂ©e comme une faute de style » La monotonie engendre toujours lâennui la vue se fatigue dâun paysage sans variĂ©tĂ© ; de mĂȘme lâesprit, dâun vocabulaire sans diversitĂ©. Toute rĂ©pĂ©tition est donc en principe faute de style elle Ă©mousse, puis lasse lâintĂ©rĂȘt du lecteur ; elle dĂ©prĂ©cie lâauteur en soulignant lâindigence de ses moyens dâexpression ou, signes tout aussi fĂącheux, sa nĂ©gligence et son goĂ»t de lâimprovisation. Courault 1957, p. 67 27La mĂȘme condamnation se retrouve dans des manuels bien plus rĂ©cents Savoir Ă©viter les rĂ©pĂ©titions. Câest un dĂ©faut hĂ©las trop frĂ©quent. Il suffit bien souvent dâune lecture attentive pour lâĂ©viter et pourtantâŠLe temps passait et lâon ne voyait rien ni on nâentendait fois on » et rien » dans si peu dâespace, cela saute aux yeux et aux oreilles !Le temps passait et lâon ne voyait ni nâentendait rien. Gourichon et al. 1991, Fiche 10, je souligne 28Des exercices sont proposĂ©s qui permettent de bannir le mot qui revient trop souvent », et dans la prose des grands auteurs, on blĂąme les rĂ©pĂ©titions lexicales, comme autant dâĂ©tourderies qui auraient Ă©chappĂ© Ă leur sagacitĂ©. 29On peut souligner que le discrĂ©dit qui frappe la rĂ©pĂ©tition est extrĂȘmement fort en France, bien plus quâen Allemagne par exemple, oĂč Wiederholung nâest pas systĂ©matiquement associĂ© Ă un manque. Câest un fait que lâon peut aisĂ©ment constater dans les ouvrages traduits vers le français voir Prak-Derrington 2011a. Les auteurs Ă©trangers peuvent rĂ©pĂ©ter des mots sans ĂȘtre pour autant soupçonnĂ©s dâindigence lexicale. Leurs traducteurs français, parce quâils sont soumis aux rĂšgles du beau style, sâattachent Ă bannir dans la langue-cible le français les rĂ©pĂ©titions qui figurent dans le texte original, pratique que lâĂ©crivain tchĂšque Milan Kundera a, dans ses Testaments trahis 1993, p. 131, violemment critiquĂ©e. 30Ainsi, la rĂ©ception de la rĂ©pĂ©tition, trop souvent assimilĂ©e Ă une faute de style en France, empĂȘche a priori de voir et dâexpliquer ce qui lâunit pourtant intrinsĂšquement Ă lâĂ©lan, aux forces vives, Ă la crĂ©ation. Du cĂŽtĂ© de lâĂ©tymologie 14 RĂ©pĂ©ter est empruntĂ© dĂ©but xiiie siĂšcle au latin repetere, âchercher Ă atteindreâ, âatteindre ... 15 une fois de plus, de nouveau, Ă nouveau, une nouvelle fois, encore une fois ». En ligne [http ... 31Si lâĂ©tymologie ne constitue pas en soi un argument, elle permet cependant dâapporter un Ă©clairage intĂ©ressant sur le lien entre re-nouveau » et rĂ©pĂ©tition ». En latin, repetere vient du verbe petere qui signifie chercher Ă atteindre », et veut donc dire chercher Ă atteindre de nouveau ou bien Ă nouveau prĂ©fixe re- »14. Le français oppose en effet les locutions de nouveau qui sâajoute Ă ou remplace une chose de mĂȘme type, en Ă©tant ou non tout Ă fait semblable », TLFi et Ă nouveau Dâune maniĂšre diffĂ©rente, sur de nouvelles bases ; comme si câĂ©tait la premiĂšre fois », ibid.. Une autre fois, ou bien une nouvelle fois, qui est comme une premiĂšre fois. La distinction est subtile, et sans doute nâest-il pas indiffĂ©rent de constater quâelle tend aujourdâhui Ă sâeffacer dans la conscience des locuteurs, qui utilisent indiffĂ©remment les deux locutions adverbiales. En allemand, la distinction entre la rĂ©pĂ©tition qui sâajoute et celle qui remonte Ă la source est incluse dans un seul mot, wieder wieder-holen, câest aller chercher » holen, une nouvelle fois » wieder. Le verbe holen indique clairement quâil sâagit dâune action volontaire. Et la particule implique que toute autre fois, toute fois supplĂ©mentaire est susceptible de nous ramener Ă lâorigine, Ă la toute premiĂšre fois le dictionnaire Duden donne comme synonymes de wieder les termes suivants abermals, aufs Neue, erneut, neuerlich, noch einmal, etc.15. LâexpĂ©rience de la rĂ©pĂ©tition se place [âŠ] sous le symbole printanier de la source » Duborgel 1992, quatriĂšme de couverture. La rĂ©pĂ©tition, ce nâest jamais le nouveau. Câest â ĂŽ combien plus beau â le re-nouveau. Câest la conscience de la rĂ©pĂ©tition qui permet de dĂ©passer la rĂ©duplication et la reproduction serviles. 32Et dâen reconnaĂźtre la dualitĂ© elle est immĂ©moriale et inaugurale, ancienne et Ă venir, ni tout Ă fait la mĂȘme ni tout Ă fait une autre, par le seul Ă©coulement du temps. Pour citer de nouveau Kierkegaard, le philosophe le plus autobiographique, le plus humain de la rĂ©pĂ©tition Câest prĂ©cisĂ©ment le fait dâavoir existĂ© qui donne Ă la rĂ©pĂ©tition le caractĂšre dâune nouveautĂ©. Quand les Grecs disaient que toute connaissance est rĂ©miniscence, ils entendaient par lĂ que tout ce qui est a Ă©tĂ© ; et quand on dit que la vie est une rĂ©pĂ©tition, on signifie la vie qui a dĂ©jĂ Ă©tĂ© devient maintenant actuelle. Si lâon ne possĂšde pas la catĂ©gorie de la rĂ©miniscence ni celle de la rĂ©pĂ©tition, alors toute la vie se rĂ©duit Ă un bruit confus et insignifiant. Kierkegaard 1990, p. 60-61, je souligne 33Entreprise de re-dĂ©couverte, pratique de lâĂ©tonnement, par la rĂ©pĂ©tition peut jaillir lâinvention. ĂmancipĂ© du re-souvenir, le mouvement rĂ©flexif de la rĂ©pĂ©tition contraint Ă poser sur les choses, les mots, le monde, un regard dĂ©gagĂ© de la gangue de lâhabitude, qui les rend signifiants. La quĂȘte de la bonne rĂ©pĂ©tition 16 La compulsion de rĂ©pĂ©tition Wiederholungszwang est associĂ©e Ă des conduites nĂ©gatives et ouverte ... 34On constate que, dĂšs que lâon se dĂ©tourne de lâanalyse en termes psychopathologiques â depuis Freud, qui a thĂ©orisĂ© la rĂ©pĂ©tition comme Zwang ou compulsion », elle est envisagĂ©e comme une sorte de fatum » Laplanche et Pontalis 2007 [1967], p. 8516 â ainsi que de la rĂ©pĂ©tition verbale oĂč elle est rabĂąchage, radotageâŠ, dĂšs que lâon aborde dâautres domaines, il devient beaucoup plus facile de la dissocier de ses propriĂ©tĂ©s nĂ©gatives, pour voir surgir les variations, la diffĂ©rence. 35 Eadem mutata resurgo » Je renais Ă lâidentique » est lâĂ©pitaphe en forme de spirale que le mathĂ©maticien et physicien Jacques Bernoulli XVIIe siĂšcle a fait graver sur sa tombe. Spirale, boucle, cycle, sĂ©ries autant de manifestations du principe de changement-invariance ou de rĂ©pĂ©tition-variation, autant de phĂ©nomĂšnes indissociables et de lâapprentissage et de la crĂ©ation. Apprentissage et rĂ©pĂ©tition 36Il nâest pas dâapprentissage possible sans rĂ©pĂ©tition. Quâil sâagisse de lâacquisition dâune langue, maternelle ou seconde, de lâacquisition de savoirs ou de savoir-faire, de la pratique dâun mĂ©tier, dâun instrument, dâun sport⊠apprendre dans les deux sens du termes, lehren et lernen en allemand, teach et learn en anglais, pour quelque activitĂ© que ce soit, câest rĂ©pĂ©ter, ou imiter. Mais on ne rĂ©pĂšte pas bĂȘtement comme un perroquet », en faisant par lĂ mĂȘme preuve dâun comportement moutonnier », mais pour sâapproprier une compĂ©tence dans le dialogue et dans lâinteraction avec lâautre. Les mĂ©taphores animaliĂšres attestent du lien Ă©tabli communĂ©ment entre imitation et esprit censĂ©ment peu Ă©voluĂ©, mais la rĂ©pĂ©tition, en tant quâimitation, nâest pas une facultĂ© mineure et rĂ©servĂ©e aux tout jeunes enfants. Câest un processus dynamique, intersubjectif, essentiel tout au long de notre vie dâhumain. Notre approche de lâimitation est aujourdâhui entiĂšrement renouvelĂ©e par les recherches effectuĂ©es en sciences cognitives et mise en relation avec des formes spĂ©cifiques de lâintelligence humaine, telles que le langage et la culture Imitation is often thought of as a low-level, cognitively undemanding even childish form of behavior, but recent work accross a variety of sciences argues that imitation is a rare ability that is fundamentally linked to characterically human forms of intelligence, in particular to language, culture, and the ability to understand other minds. Hurley et Chater 2015, p. 1 37Dans le domaine de lâacquisition du langage, cette revalorisation de la rĂ©pĂ©tition et de lâimitation sâinscrit contre la thĂšse de lâexistence dâune grammaire universelle prĂŽnĂ©e par Chomsky et les thĂ©oriciens nativistes du langage, et dĂ©fend au contraire lâidĂ©e dâune grammaire construite et Ă©laborĂ©e dans et par lâusage Câest Ă travers la rĂ©pĂ©tition de pratiques discursives et leur extension Ă des contextes toujours sensiblement diffĂ©rents que sâĂ©laborent peu Ă peu des systĂšmes de signes linguistiques autour de grammaires toujours plus complexes. Rossi 2012, p. 214 38Lâapproche fonctionnaliste des grammaires dites de construction Tomasello 2005, par lâĂ©tude des variations imitatives, montre le dynamisme inhĂ©rent au processus de rĂ©pĂ©tition, aux jeux dâĂ©cho entre lâenfant et lâadulte, des premiĂšres productions vocales au geste de pointage, des onomatopĂ©es aux premiers mots Câest dans et par ce jeu dâĂ©chos que lâenfant re-fabrique activement la langue quâil acquiert entre les choses vues et entendues et les variations imitatives quâil produit, mais aussi entre les progrĂšs de lâenfant et les conduites dâĂ©tayage qui lâaccompagnent constamment. Rossi 2012, p. 229 CrĂ©ation et rĂ©pĂ©tition 17 Voir en allemand Felix 2001, FlaĂpöhler 2007, Mensger 2012, etc. 39Dans le domaine de la crĂ©ation artistique, la conception de lâimitation comme processus stĂ©rile, et lâidĂ©e selon laquelle lâart et la crĂ©ation ont uniquement partie liĂ©e avec lâoriginalitĂ© se retrouvent pareillement mises en question. Ces trente derniĂšres annĂ©es, un changement de paradigme sâest lĂ aussi effectuĂ© qui fait Ă©merger, Ă cĂŽtĂ© de lâimage romantique dâun artiste qui crĂ©e en toute libertĂ©, selon des critĂšres forcĂ©ment individuels, forcĂ©ment singuliers, la nĂ©cessitĂ© de la rĂ©pĂ©tition dans la crĂ©ation comme processus dynamique. Dâabord minoritaires, les colloques et les ouvrages consacrĂ©s Ă une rĂ©pĂ©tition crĂ©ative se succĂšdent aujourdâhui de maniĂšre de plus en plus rapprochĂ©e CrĂ©ation et rĂ©pĂ©tition Passeron 1982, Figures de la rĂ©pĂ©tition Duborgel 1992, Lâart de rĂ©pĂ©ter psychanalyse et crĂ©ation Delaplace 2014, Boucle et rĂ©pĂ©tition musique, littĂ©rature, arts visuels BelloĂŻ et al. 201517, et RĂ©pĂ©tition. Du mot au concept BaillĂ© et Fernex 2016. 18 Dicolatin, s. v. ars ». En ligne [ 40Tous ces ouvrages tĂ©moignent de ce que les deux derniers siĂšcles, qui ont fait largement coĂŻncider art et nouveautĂ©, crĂ©ativitĂ© et originalitĂ©, avaient pu faire oublier Une bonne partie de lâart a Ă©tĂ© et reste rĂ©pĂ©titive. Le concept dâoriginalitĂ© absolue est une notion contemporaine, nĂ©e avec le romantisme » Eco 1994, p. 21. Lâart a vocation Ă rĂ©pĂ©ter. Dans la GrĂšce antique, le mĂȘme mot, tekhnĂ©, dĂ©signait Ă la fois lâart et lâartisanat. Au Moyen Ăge, ars signifie tout Ă la fois lâart, le savoir-faire, et lâactivitĂ© professionnelle18. CrĂ©er, câest rĂ©pĂ©ter. 41Il faut distinguer cependant entre rĂ©pĂ©tition figurale saillante et rĂ©pĂ©tition non figurale nĂ©cessaire, mais invisible. Le concept de rĂ©pĂ©tition figurale est au centre de cet ouvrage. Je me contente ici dâintroduire sommairement cette opposition par un exemple empruntĂ© Ă lâarchitecture du quotidien. Les marches dâun escalier, les Ă©tages dâun immeuble, les fenĂȘtres dâune façade, les carreaux dâun carrelage nâexistent que par la rĂ©pĂ©tition. Mais nul ne la voit. Elle est transparente. Il faut quâelle se constitue en patterns ou en schĂšmes, en figures pour ĂȘtre identifiĂ©e comme telle. Lorsquâelle organise et structure lâobjet, elle le figure », au sens vieilli de lui donner forme » figurer donner une forme, une figure Ă quelque chose », dâaprĂšs le TrĂ©sor de la langue française informatisĂ©. Il nây a pas de rĂ©pĂ©tition figurale dans un carrelage uni â jâemploie lâadjectif figural au sens de qui fait figure ». Mais il y en a dans les mosaĂŻques des carreaux en ciment. Il arrive que seuls la quantitĂ© et le dĂ©passement dâun certain seuil dĂ©terminent lâaccĂšs au figural pour la rĂ©pĂ©tition. Un immeuble de dix Ă©tages ne sera pas figural », mais un gratte-ciel le sera â la dĂ©nomination mĂ©taphorique skyscraper, Wolkenkratzer renvoie dâailleurs Ă cette saillance figurale. 42De la mĂȘme façon, tout art implique rĂ©pĂ©tition, mais seuls certains artistes la placent au cĆur mĂȘme de leur travail. Ainsi, Giacometti est vu comme un sculpteur de la rĂ©pĂ©tition parce quâil est fascinĂ© par un tout petit nombre de thĂšmes, ce en quoi il tranche avec la diversitĂ© gargantuesque dâun Picasso. 43Il est impossible de dresser ici lâinventaire de tous les domaines artistiques oĂč la rĂ©pĂ©tition figurale est au cĆur du processus crĂ©ateur, encore moins dâĂ©numĂ©rer pour chacun de ces domaines ses innombrables modalitĂ©s. Je renvoie aux ouvrages citĂ©s ci-dessus. MĂȘme une liste trĂšs partielle suffit cependant Ă faire prendre conscience de lâĂ©tendue de la rĂ©pĂ©tition figurale dans la crĂ©ation non verbale. 44Il y a dâabord la musique, qui est un art du temps. Les schĂšmes formels de la rĂ©pĂ©tition permettent dâinscrire et de diffĂ©rencier les Ă©lĂ©ments sonores dans la mĂ©moire, de les organiser en un dĂ©coupage temporel cohĂ©rent pour les auditeurs. Le lien entre rĂ©pĂ©tition et musique est semblable Ă celui qui lâunit Ă la poĂ©sie, ou encore Ă certaines formes de discours Ă©pidictique Ruwet 1972 il sâagit de structurer pour lâoreille un continuum sonore, et de crĂ©er des paradigmes qui nous affranchissent de la linĂ©aritĂ©. La musique est magique, elle mĂȘle le passĂ© au prĂ©sent, le souvenir Ă lâanticipation. Le prĂ©visible de la rĂ©pĂ©tition sâallie Ă lâimprĂ©visible de la variation, et chaque nouvelle fois est Ă©cho, nous offre un temps retrouvĂ© qui transfigure la premiĂšre fois. Toute la musique occidentale est art de rĂ©pĂ©ter, si lâon excepte la musique atonale. Je ne retiens ici que deux parangons de la rĂ©pĂ©tition musicale, Ă plus de deux siĂšcles de distance au XVIIIe siĂšcle, LâArt de la fugue de Bach ; aux XXe et XXIe siĂšcles, la musique rĂ©pĂ©titive de Philip Glass. 45Il y a la rĂ©pĂ©tition dans les arts visuels. En peinture, ce sont les sĂ©ries les autoportraits de Rembrandt, oĂč chaque portrait est dĂ©guisement et mĂ©tamorphose, la cathĂ©drale de Rouen et les nymphĂ©as de Monet, la montagne de la Sainte-Victoire de CĂ©zanne, les natures mortes cubistes, lâoutrenoir inlassablement dĂ©clinĂ© par Soulages⊠Lâobsession, le travail acharnĂ© sur un mĂȘme thĂšme manifeste une quĂȘte dĂ©rĂ©alisante », dĂ©naturante », qui passe par des exercices formels sur la couleur, la matiĂšre, la lumiĂšre, les formes et les contours, etc. [Les sĂ©ries] conduisent Ă mĂ©diter sur cette fascination du regard obsĂ©dĂ© par un thĂšme que le travail pictural fait disparaĂźtre par lâeffet dâexercices formels de plus en plus dĂ©rĂ©alisants. Câest que le travail sĂ©riel contient le destin temporel de la vision lâĆil ne sâarrĂȘte pas arbitrairement sur un simple prĂ©texte, il choisit lâobjet sur lequel il va sâacharner, car la sĂ©rie a pour but de dĂ©naturer [âŠ]. Mondzain-Baudinet, s. d., je souligne 46Il y a la rĂ©pĂ©tition en sculpture les monumentales statues de lâĂźle de PĂąques, lâĆuvre du sculpteur Giacometti, ses hommes en marche et ses femmes immobiles et debout, qui donnent Ă voir ce qui reste quand lâesprit a oubliĂ© tous les dĂ©tails » Picasso, citĂ© par DufrĂȘne 1992, p. 98. 47Il y a la rĂ©pĂ©tition dans les arts sĂ©riels les sĂ©rigraphies de lâicĂŽne du pop art Andy Warhol, la photographie, la publicitĂ©, la vidĂ©o, les sĂ©ries tĂ©lĂ©visĂ©es, leurs gĂ©nĂ©riques Ă chaque fois rĂ©pĂ©tĂ©s, etc. 48Il y a, enfin, la rĂ©pĂ©tition au sens de sĂ©ance de travail, en musique et dans les arts vivants, le théùtre et la danse, sur lesquels se conclut cette Ă©numĂ©ration. 49Dans le domaine des arts, la rĂ©pĂ©tition signifie sĂ©ance de travail au cours de laquelle on rĂ©pĂšte une Ćuvre musicale, dramatique, chorĂ©graphique en vue de son exĂ©cution, de sa reprĂ©sentation en public » TLFi. Les arts vivants prĂ©sentent alors la particularitĂ© de mettre Ă nu la dimension de quĂȘte de la rĂ©pĂ©tition. Le temps des rĂ©pĂ©titions correspond alors Ă celui de la genĂšse, des tĂątonnements, de lâĂ©laboration, ce quâindique parfaitement en allemand le terme de Proben essais » ou tentatives ». Il est non pas une reprise mĂ©canique, une imitation stĂ©rile, mais une vĂ©ritable recherche le temps de lâacquisition, de lâappropriation et de la mĂ©tamorphose dâune Ćuvre par les musiciens, acteurs, danseurs, interprĂštes, dans une pratique collective et non plus individuelle. 50En musique, la rĂ©pĂ©tition est le temps de lâajustement et de lâaccordage des musiciens entre eux, comme le souligne le philosophe Richard Sennett dans lâintroduction de son ouvrage Ensemble. Pour une Ă©thique de la coopĂ©ration 2013b. Souvent, les musiciens professionnels ne se connaissent pas et nâont que quelques heures pour sâentendre sur lâinterprĂ©tation Ă donner Ă la partition. La coopĂ©ration passe alors par la rĂ©pĂ©tition Les rĂ©pĂ©titions sont la base de la musique ; quand on rĂ©pĂšte, les compĂ©tences dâĂ©coute sont dâune importance vitale ; Ă©coutant bien, le musicien devient une crĂ©ature plus coopĂ©rative. [âŠ] Les musiciens qui rĂ©pĂštent sont des eriksoniens adultes ; ils ont besoin dâinteragir, dâĂ©changer pour leur bĂ©nĂ©fice mutuel. Ils ont besoin de coopĂ©rer pour faire de lâart. Sennett 2013b, p. 28 et 32 51Au théùtre, la pratique collective quâest la rĂ©pĂ©tition est le temps du donner corps, le temps qui rend possible lâincarnation Le metteur en scĂšne ne rĂ©pĂšte pas [âŠ] il est en quĂȘte [âŠ] dâune opĂ©ration de mĂ©tamorphose qui fait dâun mot une voix, dâun discours un corps » Lucet 2014, p. 152. 52Sur le plan temporel, le temps des rĂ©pĂ©titions, tout entier tournĂ© vers la date de la premiĂšre reprĂ©sentation, nâest pas redite, mais baptĂȘme » du prĂ©sent par lâavenir ibid., p. 156, et le futur lui donne toute sa lĂ©gitimitĂ©. Câest, vĂ©ritablement, la reprise vivifiante, le ressouvenir en avant » de Kierkegaard. Et, de maniĂšre ironique, la premiĂšre Premiere scelle la fin de la rĂ©pĂ©tition vers lâavant ». Qui marque lâavĂšnement dâun dĂ©jĂ -acquis. La rĂ©pĂ©tition a ancrĂ© et fixĂ© lâĆuvre de maniĂšre indĂ©lĂ©bile ; elle devient le socle Ă partir duquel le spectacle pourra chaque soir ĂȘtre rĂ©inventĂ© Pour faire exister chaque soir un nouveau spectacle, il faut ĂȘtre capable de le rĂ©inventer, et pour que le geste théùtral puisse Ă©chapper au clichĂ©, demeurer vivant, il faut avoir rĂ©pĂ©tĂ© longtemps. La rĂ©pĂ©tition, au sens plein, est cet exercice qui permet de maintenir une tension entre la recherche, la dĂ©couverte et la remĂ©moration. Campan 2008, p. 485 * 19 WikipĂ©dia, s. v. nymphĂ©as ». 53Ce rapide parcours interdisciplinaire nâavait pas dâautre but que de rappeler la nĂ©cessitĂ© de sâaffranchir de la conception par trop nĂ©gative de la rĂ©pĂ©tition dans le langage, telle quâelle est encore transmise en France, dans les dictionnaires et les manuels scolaires. Cette rĂ©ception nĂ©gative se retrouve de maniĂšre insidieuse en sciences du langage, oĂč la rĂ©pĂ©tition Ă©tait encore vue, jusquâĂ rĂ©cemment, comme un phĂ©nomĂšne peu intĂ©ressant parce que trop Ă©vident. Mais câest amputer la rĂ©pĂ©tition de sa richesse que de la rĂ©duire Ă un processus mĂ©canique. Comment se fait-il que lâon considĂšre comme une quĂȘte positive, une preuve de son gĂ©nie, le fait que Monet ait inlassablement peint des nymphĂ©as environ deux cent cinquante fois19, et que lâon condamne dans le langage une rĂ©pĂ©tition qui se dĂ©ploie sur plusieurs dizaines de fois ? Les rĂ©pĂ©titions, mĂȘme en trĂšs grand nombre, ne sont, dĂšs lors quâelles sont voulues, ni fautives ni inutiles. MĂȘme dans ses formes les plus discrĂ©ditĂ©es, la rĂ©pĂ©tition intentionnelle fait sens. Elle signifie. 54Comment ? Comprendre mieux la bonne rĂ©pĂ©tition dans le langage peut-il nous permettre de mieux accepter la mauvaise rĂ©pĂ©tition dans la vie ? Câest en tout cas lâespoir et la croyance qui ont portĂ© cet ouvrage, et qui expliquent, aussi, le choix de ne lâapprĂ©hender que ex positivo⊠Sans doute la rĂ©pĂ©tition est-elle [âŠ] ce qui enchaĂźne, mais si lâon meurt de la rĂ©pĂ©tition, câest elle aussi qui sauve et qui guĂ©rit, et qui guĂ©rit dâabord de lâautre rĂ©pĂ©tition » Deleuze 2011, p. 13.
se dit d un sketch joué sans répétition